Flibuste et Trésors

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Flibuste, piraterie et trésors archéologiques sous-marins

Jean-Pierre MOREAU

Trésors archéologiques sous-marins des Petites Antilles

I - Définitions

II - Le patrimoine immergé lié aux civilisations précolombiennes

A Dans les eaux douces

B Sous la mer

III - Le patrimoine immergé lié à la civilisation européenne

IV - Du naufrage au site archéologique

A Raisons de type documentaires : imprécision des archives

B Raisons de type physico-chimiques

V - Analyse du patrimoine archéologique sous-marin de Guadeloupe et de Martinique

A Les circonstances conduisant au naufrage d\’un bâtiment

B Localisation des sites

C Nationalités et types de bâtiments naufragés

D Typologie des bâtiments naufragés

VI - Législation sur la protection des biens culturels immergés : que faire en cas de découverte ?

VII - Intérêts scientifique et muséologique de ce patrimoine immergé

VIII - Mes propres travaux : à la recherche de la nef capitane du Marquis de Montesclaros

A Histoire du naufrage et des tentatives de sauvetage au XVIIème siècle

B Problématique de la recherche

C Les missions effectuées

IX - Mes projets

X - Une page récréative : Le trésor de l'île de la Dominique

Bibliographie succincte

Sur l'archéologie sous-marine

Sur l'archéologie sous-marine des Petites Antilles



VIII - Mes propres travaux : à la recherche de la nef capitane du Marquis de Montesclaros

Passionné par l'histoire des Petites Antilles aux XVIème - débuts XVIIème siècle (avant la colonisation) et voulant concilier à la fois une approche documentaire (par les imprimés, les cartes, les manuscrits, les archives…) et une approche archéologique sous-marine, j'ai entrepris des recherches pour localiser la nef capitane du Marquis de Montesclaros, naufragée en août 1603 sur la Guadeloupe à quelques encablures d’un des endroits où les espagnols venaient faire aiguade (se ravitailler en eau).

Retrouver des vestiges appartenant à cette nef permettrait de localiser le mouillage, ce que n'autorise pas les sources documentaires trop imprécises.

    A - Histoire du naufrage et des tentatives de sauvetage au XVIIème siècle

    Dans les dernières années du XVIème siècle et du début XVIIème siècle, l'île de la Guadeloupe est utilisée régulièrement par les flottes espagnoles, en particulier celle à destination de la Nouvelle Espagne (Mexique actuel) afin de se ravitailler en eau, bois de chauffage (pour la cuisine), pierres de lest, éventuellement vivres frais.

    En 1603, la flotte de Nouvelle Espagne sous la direction de Fulgencio de Meneses, lors de son escale sur l'île, est assaillie par les farouches guerriers Caraïbes (qui contrôlent à l'époque la plus grande partie de l'archipel des Petites Antilles) puis dispersée par une violente tempête qui s'élève peu de temps après. Trois navires naufragent dont la nef capitane du marquis de Montesclaros, futur gouverneur de la Nouvelle Espagne. Le galion heurte une roche et s'ouvre en voulant s'éloigner de la côte. Pendant que les passagers et l'équipage se réfugient sur d'autres bâtiments, quelques marins y mettent le feu pour qu'il ne tombe pas aux mains des ennemis.

    La coque éventrée vomira une partie de sa cargaison sur les côtes environnantes (jarres à huile, mercure...), comme le constateront effarés quelques mois après le naufrage des Espagnols de passage sur l'île.

    Les Indiens Caraïbes utiliseront de la toile de Rouen provenant de la cargaison pour équiper de voile leur pirogue... L'artillerie de bronze tombera en partie aux mains des flibustiers français, anglais et hollandais qui croisent dans les parages. Un anglais envisagera même une opération de récupération sur cette épave. Pendant ce temps, les Espagnols discutent de l'opportunité d'une opération de sauvetage. Elle est rentable du seul fait de l'artillerie de bronze. Mais faut-il utiliser la flotte de Nouvelle Espagne à cet effet lors de l'escale ? Les généraux des flottes n'y sont guère favorables car cela retarderait trop la marche du convoi. Il est donc envisagé une opération spécifique en dehors de la flotte.

    Les gens de Porto Rico ou de l'île de Margarita à quelques centaines de kilomètres du site, déjà aguerris en ce qui concerne le climat et les rapports conflictuels avec les Caraïbes ne seraient-ils pas les mieux à même de remplir cette mission ? Des courriers sont envoyés, des noms sont avancés mais il ne se passe toujours rien. L'affaire semble oubliée jusqu'à ce que l'amiral Nicolas de Cardona obtienne en 1614 une concession pour aller rechercher de nouveaux bancs d'huîtres perlières et les restes de naufrages espagnols dans la mer des Antilles. L'album de peintures ramené de l'expédition (conservé à la bibliothèque nationale à Madrid) ne nous dit pas les résultats du sauvetage mais précise à la lettre C la position de l'épave de la nef capitane. Quoiqu'il en soit après cette date, l'on ne trouve plus trace de l'événement dans les archives espagnoles.

    B - Problématique de la recherche

    Il était clair qu'il s'agissait au mieux de trouver un fond de carène à condition qu'elle n'ait pas été disloquée et éparpillée par les dizaines et les dizaines de cyclones qui se sont abattus dans cette zone depuis 400 ans ; particulièrement destructeur dans les fonds inférieurs à 10 mètres où se trouve l'épave. L'intérêt de la recherche ne résidait pas du côté de l'archéologie navale ou de l'étude de la cargaison mais plutôt dans l'histoire et l'histoire de la navigation dans les Petites Antilles. Comme je l'expliquais précédemment, localiser l'épave permettrait d'affirmer avec certitude que les Espagnols utilisaient le mouillage de la rivière de Vieux Habitants,ce que les sources documentaires ne nous indiquent pas avec précision.

    C - Les missions effectuées

    Je me suis rendu 4 fois dans la zone potentielle du site. La première mission amena la découverte d'un certain nombre d'objets (une ancre du XVIIIème siècle avec son jas en bois, une ancre plus ancienne mais trop petite pour être celle d'un galion, des canons de différents calibres avec des boulets mais du XVIIIème siècle également), la seconde amena la découverte d'objets ayant appartenu au " WYE " bâtiment postal anglais qui fut sur le point de naufrager dans la zone. La troisième se solda par un échec puisque le magnétomètre perfectionné (qui devait nous permettre de travailler dans cette zone à fortes anomalies magnétiques) tomba en panne dès le deuxième jour. La quatrième mission en compagnie d’un géographe du CNRS spécialiste de l'évolution des rivages m'a permis de confirmer mes hypothèses sur la localisation du site mais également hélas mes appréhensions sur sa disparition totale à la suite des opérations de sauvetage et surtout des cyclones. Une dernière mission avec un pénétrateur de sédiments pour déceler des vestiges indétectables confirmerait définitivement cette conclusion.

IX - Mes projets

Ayant mis quasiment un point final à la recherche de la nef capitane en Guadeloupe je m'oriente maintenant vers un autre projet. Toujours dans l'optique de concilier une recherche documentaire et une approche archéologique sous-marine je m'intéresse maintenant à un site de bâtiments flibustiers naufragés.

Si des sites de bâtiments pirates ont déjà fait l'objet d'étude : le " Speaker " de John Bowen à l'île Maurice ou le "Whydah " de Bellamy sur les côtes du Massachussetts, par contre, aucun bâtiment flibustier n'a encore été localisé et étudié. Plusieurs missions se sont succédées à la recherche de l'"Oxford " qui avait explosé avec Morgan à bord sur l'île à Vache, mais sans aucun résultat pour le moment. Il y eut bien des fouilles sur le site de Port Royal de la Jamaïque engloutie depuis 1692 mais cela faisait déjà 20 ans à l'époque que la flibuste était interdite du côté anglais et qu'elle n'était donc plus une grande cité flibustière.

J'ai localisé un site avec des bâtiments flibustiers naufragés mais seulement sur le papier. il faut maintenant réunir une autorisation, une équipe et un financement ! Toutes les bonnes volontés seront les bienvenues !

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